C’est un scandale ou plutôt une succession de scandales de laisser des établissements scolaires devenir des risques mortels pour les enfants de la République. Ces scandales s’ajoutent insupportablement à ceux qui se sont succédé au cours des dernières décennies dans le monde du travail. Si la justice a bel et bien reconnu le risque d’exposition à l’amiante dans l’industrie et les transports, s’il est bien admis qu’un préjudice d’anxiété suite à une exposition professionnelle doit être indemnisé, cela n’est pas (encore) le cas dans les locaux de l’éducation Nationale. Mais c’est là que réside peut-être le plus gros problème, ces locaux amiantés ou susceptibles d’être amiantés mais pas toujours diagnostiqués n’appartiennent plus à l’éducation Nationale. Ils ont été transmis aux communes, départements et régions. En fait, si nous voulons, nous, citoyens, que l’amiante disparaisse des établissements scolaires, il semble que c’est à nous, électeurs et citoyens, que revient la décision.
C’est en 1980 que l'État a engagé une opération de décentralisation des compétences destinée à renforcer le poids des collectivités territoriales. Pour citer le site officiel de l’Education Nationale :
Or, parmi ces bâtiments scolaires, la majorité des établissements scolaires construits avant 1997 contiendraient des fibres toxiques d’amiante. Qu’ils aient été construits avant ou après 1980, que leur construction ait été du ressort de l’État ou de la collectivité territoriale, la responsabilité du désamiantage de ces bâtiments devrait revenir de fait à leur propriétaire actuel, c’est-à-dire la commune, le département ou la région.
Mais comme cela représente beaucoup d’argent à dépenser et de problèmes d’hébergement des activités scolaires à envisager, beaucoup de communes, départements et régions n’ont pas toujours les moyens de remplir les obligations de désamiantage que la Loi de la République impose à toutes personnes physiques et morales.
Et puis, dans l’esprit de beaucoup, il appartiendrait à l’État en tant qu’ancien propriétaire de ces bâtiments d’être tenu responsable d’avoir transmis aux collectivités locales des bâtiments recelant le ‘vice caché’ de la présence d’amiante. Il peut sembler déloyal de transmettre des bâtiments apparemment sains et de modifier ensuite la législation qui les rend ensuite insalubres ou dangereux.
Qu’il s’agisse d’élus locaux ou du gouvernement, il reste inacceptable que certains établissements n’aient toujours pas reçu de DTA (Diagnostic Technique Amiante). Ni le personnel enseignant ou de service, ni les enfants ne peuvent alors savoir s’ils ont été, sont ou seront exposés. N’oublions pas que l’incertitude est un préjudice d’anxiété qui peut être indemnisé par voie de justice.
L’État, notamment par son représentant local, le préfet, mais aussi l’Éducation Nationale pourraient mettre en demeure toute collectivité territoriale ou tout chef d’établissement de se conformer enfin à la Loi et de prendre les mesures obligatoires de protection de la population et notamment des plus faibles, les enfants.
Bien sûr, quelques-uns essaient toujours de faire porter la responsabilité aux autres, mais l’urgence impose que les obligations sanitaires soient respectées. Qu’importe pour le contribuable que l’argent vienne de l’État, de la région, du département ou de la commune puisqu’au final, il s’agit d’argent public donc de ses contributions, prélèvements, taxes et impôts.
Quel que soit le niveau auquel revient la responsabilité du désamiantage des établissements scolaires, l’action est insuffisante et c’est préjudiciable.
Il faut donc sensibiliser le grand public afin que les citoyens puissent faire pression sur les responsables. A ce sujet saluons les actions de certains média dont Libération, Le Monde, et urgence-amiante-école pour n’en citer que quelques-uns.
Alors bien sûr, on peut comprendre qu’en ces temps d’endettement national au plus haut, ni l’État, ni les collectivités territoriales n’aient les moyens de procéder au désamiantage de tous les bâtiments publics. Mais le manque de moyens pour l’action ne justifie en aucun cas le défaut criant d’information du public surtout en termes de santé publique.
Malgré les demandes et réclamations de nombreux acteurs (dont nous) auprès des pouvoirs publics, il n’a jamais été publié une cartographie nationale, régionale, départementale ou communale des bâtiments publics à risque ‘amiante’ (Écoles, collèges, lycées, tribunaux, musées, hôpitaux…). Pourtant ces données et tout au moins la date de construction de ces édifices (antérieure ou postérieure à l’interdiction de l’amiante) est bien connue et d’autant plus lorsqu’il s’agit de bâtiments de l’État ou de collectivités territoriales.
On se demande alors quelles sont les priorités de nos élus et dirigeants lorsque les ERP ont obligation d’afficher (entre autres) le DPE des locaux ; que ce DPE est transmis à l’observatoire du DPE afin de statistiques publiques d’avancée de la performance énergétique et que les mêmes obligations ne soient pas applicables au risque amiante ?
Peut-être que l’amélioration de la performance énergétique du parc immobilier privé et public (même si elle se fait trop lentement par rapport aux objectifs) reste un support de communication positive quand la découverte de l’étendue du parc immobilier amianté pourrait être cause de vindicte.
SASU au capital de 100 000 EUR | Immatriculée au RCS de Bayonne sous le numéro unique d'identification 490 097 888