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Diagnostic amiante, un mépris des locataires ?

Obligatoire avant la vente d’un logement bâti selon un premier permis de construire antérieur à juillet 1997, le diagnostic amiante est un des rares à ne pas être obligatoire à la location. S’il est énoncé officiellement que lorsqu’un diagnostic amiante a été réalisé, il doit être remis au locataire sur simple demande ; en fait, rien n’oblige vraiment le bailleur à le faire réaliser. Non inclus dans la liste des diagnostics immobiliers à annexer au bail, le diagnostic amiante avant location est un flou réglementaire, juridique et sanitaire. Les locataires ne méritent-ils pas cette information sur une éventuelle présence d’amiante et sur l’état de conservation des matériaux amiantés ? Ce flou réglementaire est-il un simple oubli ou une manœuvre stratégique ?

Le flou réglementaire du diagnostic amiante avant location

Sur la source officielle service-public.fr, il est bien précisé « Vous devez faire réaliser un état d'amiante en cas de vente d'un logement (appartement, maison individuelle) si le permis de construire a été délivré avant juillet 1997. ». Mais cette obligation n’apparaît pas en cas de location.

Selon la hiérarchisation ambigüe des textes, il faudrait d’abord bien lire que le DAPP (Diagnostic Amiante des Parties Privatives) est obligatoire depuis le 1er février 2012 pour tout lot de copropriété (dont les logements) situé dans un immeuble soumis à l’obligation de diagnostic amiante. En ce cas, cette obligation de remettre un ‘diagnostic amiante’ à tout locataire en faisant la demande vise bien la communication du DAPP obligatoire.

A savoir : L’article L 1334-12-1 du Code de la santé publique prévoit que les propriétaires d’immeubles (dont les lots de copropriété) bâtis avant 1997 sont tenus de rechercher la présence d’amiante. En cas de présence détectée, un diagnostic de l’état de conservation de l’amiante dans les matériaux et produits repérés doit être dressé. En vigueur depuis 2012, on considère que cette obligation a été remplie pour tous les logements concernés qui devraient donc, en principe, avoir été diagnostiqués. Et, depuis le 1er avril 2013, le propriétaire bailleur est tenu de mettre à la disposition du locataire le diagnostic amiante.

Si la réalisation du DAPP est obligatoire pour tout appartement d’un immeuble dont le premier de construire est antérieur à juillet 1997, il n’en reste pas moins des lacunes. D’une part parce que cette obligation de DAPP ne s’applique pas aux maisons individuelles dont les locataires resteront dans l’ignorance quant à un probable risque amiante, et d’autre part parce qu’il n’y a pas de contrôle en cas de défaut de réalisation d’un DAPP obligatoire. 

Nota : La loi ALUR du 24 mars 2014 exige qu’une copie de l’état mentionnant l’absence ou la présence d’amiante soit annexée au contrat de location lors de sa signature. Sauf que cette obligation n’est toujours pas entrée en vigueur à ce jour…

Sanctions et contraintes de réalisation du DAPP

Il est bien prévu une sanction en cas d’absence de DAPP ainsi qu’en cas de défaut de mise à disposition du locataire du DAPP du logement et/ou du DTA de l’immeuble. 

Le défaut de remise au locataire des diagnostics amiante (DAPP et DTA) constitue une violation d’obligation d’information du locataire par le bailleur. La sanction encourue est celle d’une contravention de 5e classe, sanctionnée par l’article 131-13 du Code pénal, prévoyant une amende de 1 500 euros. 

Si on comprend bien que tout locataire n’ayant pas reçu communication du DAPP du logement peut faire pression sur son bailleur pour l’obtenir, on peut également concevoir que très peu de locataires le feront. Les uns pour préserver les bonnes relations avec leur bailleur et pouvoir envisager que leur bail sera reconduit, d’autres pour éviter d’éventuels travaux de désamiantage devenus obligatoires. De même, un locataire peut alerter la préfecture du département afin que le préfet enjoigne au propriétaire de faire établir le diagnostic d’amiante et/ou de le contraindre à effectuer les éventuels travaux de désamiantage ; mais dans un cas comme dans l’autre, le niveau de risque décelé par un DAPP ainsi que les éventuelles opérations de désamiantage peuvent alors obliger le locataire à se reloger ce qui est rarement souhaité en cette période de crise du logement.

Nota : Déjà que les préfectures hésitent (rechignent ?) à apporter le concours des forces de l’ordre pour expulser les squatteurs et les locataires en impayés de loyer, on peut imaginer qu’elles hésiteront tout autant à forcer des bailleurs à réaliser un diagnostic amiante avec le risque de rendre des centaines ou des milliers de logements inhabitables. Voir le cas du ‘nouveau DPE’ qui a vite été revu dans l’urgence car il pouvait interdire de location des milliers de passoires thermiques.

 

Quelle prise en compte du risque amiante par les locataires ? 

Dans l’idéal, tout locataire d’un logement construit avant l’interdiction d’usage de l’amiante devrait obtenir le DAPP de son logement et le DTA de l’immeuble.

Dans cet idéal encore, il ne devrait pas être fait de discrimination entre un appartement en immeuble et une maison individuelle. Le risque d’une exposition à l’amiante n’est pas censé faire de telles nuances. Mais dans la pratique, cela change. 

En effet, si un logement, quel qu’il soit, a été construit selon un permis de construire initial délivré avant juillet 97, tout locataire devrait faire effectuer un repérage amiante avant travaux dès lors qu’il souhaite faire changer une prise, poser une étagère ou installer la fibre optique. Sur le site du Ministère des solidarités et de la santé il est en effet bien précisé « Avant d’envisager des travaux ou du bricolage impliquant un perçage de murs ou de sols dans des logements susceptibles de contenir de l’amiante (i.e. construits avant 1997), il convient de faire procéder à un repérage spécifique. » 

Mais si le même site indique cette obligation au propriétaire, il n’envisage à aucun moment que ce soit un locataire qui s’adonne à du « bricolage impliquant un perçage de murs ou de sols ». On en déduit que le flou quant aux risques d’exposition à l’amiante d’un locataire peut subsister officiellement et sans vergogne. Pour que ce flou soit enfin dissipé, il faudra sûrement attendre que soit adoptée la future obligation de désamiantage de toutes les constructions, actuellement dans les tuyaux au Parlement Européen…


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