Beaucoup d’entre nous se souviennent d’une sidération ou du moins d’incompréhension lorsque le Conseil constitutionnel a exclu du projet de Loi ELAN l’Observatoire des diagnostics immobiliers et peut-être un peu moins lorsque les parlementaires ont repoussé en 2021 l’opposabilité du DPE. Si nous pouvons comprendre aisément que la réglementation devait être adaptée juridiquement avant que le DPE ne devienne opposable en raison des recours et contentieux et qu’il faut un certain temps pour cela, en ce qui concerne l’Observatoire des diagnostics immobiliers, on est resté perplexe. Une interview de la sénatrice rapporteur de la Loi ELAN Dominique Estrosi-Sassone nous éclaire sur les volontés du Sénat en matière de diagnostics et de diagnostiqueurs immobiliers.
Oui le DPE (Diagnostic de Performance Énergétique) sera bien opposable, mais il faudra attendre 2021 et ce délai n’est pas superflu.
Rendre le DPE opposable, c’est dans un premier temps le rendre opposable aux vendeurs et aux bailleurs par les acquéreurs et les locataires. Cela nous apparaît comme une avancée dans la protection des consommateurs (acquéreurs et locataires) n’ayant pas à dépenser en occupant le logement bien plus d’énergie qu’espéré à la lecture de la classe énergie présentée avant la première visite. Du point de vue environnemental, c’est également une bonne avancée puisqu’on peut ainsi espérer qu’avec un DPE opposable aux vendeurs et bailleurs, les acquéreurs et locataires auront une confiance renforcée dans les bilans énergie et énergétiques du logement et favoriseront encore davantage les biens immobiliers économes en énergie. Il n’aurait pas fallu que se reproduise avec le DPE ce qu’il s’est produit avec de nombreuses marques automobiles qui auraient triché sur les annonces des émissions environnementale et que les consommateurs se sentent floués et tournent le dos à leur volonté à participer à la préservation de l’environnement via l’immobilier.
A savoir : En 2015, après qu’ait été dénoncée la fraude aux émissions polluantes, le groupe automobile Volkswagen a vu ses ventes baisser pour la première fois en 10 ans alors que la plupart des autres constructeurs (pas ou pas encore incriminés) augmentaient toujours leurs chiffres de vente, un bon exemple de la réactivité et de la volonté du grand public à s’inscrire dans la protection de l’environnement. Source Europe1
Rendre le DPE opposable aux vendeurs et bailleurs, c’est aussi permettre à ces derniers de se retourner contre le diagnostiqueur immobilier responsable en cas de recours d’un acheteur ou d’un locataire. Ce type de recours pouvant alors avoir des conséquences élevées en termes de contentieux (annulation de la vente, remboursements de loyers, indemnisations diverses…) ni les diagnostiqueurs, ni leurs assureurs n’y sont préparés actuellement. D’ailleurs, il sera intéressant de comparer le montant des primes d’assurance professionnelle des diagnostiqueurs immobiliers avant et après que le DPE ne devienne opposable. Sans vouloir apparaître pessimistes nous ne parierons pas sur une baisse des tarifs….
Donc que le DPE ne devienne opposable est une avancée mais qu’un délai de soit aménagé pour en déterminer l’opposabilité et ses conséquences semble une protection de la profession d’ODI qu’il faut saluer.
Il nous semble dommageable que cet observatoire n’ait pas pu naître ainsi qu’annoncé dans le projet de Loi ELAN. Nous avons vu avec quel empressement l’ADEME pouvait extraire des chiffres et statistiques sur la performance énergétique de nos constructions grâce à l’Observatoire du DPE et on se demande alors pourquoi nous devrions nous passer des mêmes analyses mais relatives aux autres diagnostics et notamment sécuritaires : gaz, électricité, plomb, amiante.
Amiante ? Vous avez dit amiante ? Eh oui, c’est peut-être là que la bât blesse quand on imagine qu’il faudrait annoncer ouvertement quel pourcentage du parc immobilier est encore amianté ou pas encore diagnostiqué… Ô combien d’ERP faudrait-il voir figurer dans la liste des bâtiments représentant peu ou prou un risque pour la santé (voire pour la vie) de leurs employés, occupants et visiteurs ? Ne cherchez-pas, la réponse est bien trop !
C’est pour cela sûrement que le Gouvernement refuse qu’une application sur la géolocalisation du risque amiante (pourtant prête à être diffusée) ne soit rendue publique.
Bien que les évènements liés à la contestation publique ne soient apparus qu’après les amendements et l’approbation de la Loi ELAN, il est intéressant de prendre leur impact en compte dans la volonté du Parlement (Assemblée Nationale et Sénat) de se rapprocher des préoccupations populaires. Que l’on soit (en partie) pour ou contre ce qui se déroule en ce moment, il est certain que les manifestations ont sensibilisé (enfin) nos députés et sénateurs sur les difficultés de vie de nombreux citoyens. Nul doute qu’il y aura un ‘avant’ et un ‘après’ gilets jaunes et il semble profitable que ce soit dans cette optique de représentation populaire (découverte pour certains) que nos parlementaires réétudient la nécessité des obligations en matière de diagnostics immobiliers.
S’il est vrai que ces diagnostics avant-vente et avant location sécurisent acquéreurs et locataires, ils représentent de plus en plus un coût important à la charge des vendeurs et bailleurs qui peut représenter un frein à la transaction immobilière donc au logement des citoyens. Dans son interview accordée à diagnostiqueur-immobiler, la sénatrice Estrosi-Sassone annonce que « la commission des affaires économiques du Sénat envisage de lancer, courant 2019, des travaux d’évaluation des différentes obligations en matière de diagnostics et de rénovation énergétique des bâtiments qui pèsent sur les propriétaires » mais aussi que « la commission des affaires économiques du Sénat, pourrait aussi nous amener à évaluer le niveau de compétence des diagnostiqueurs et le contrôle de leur activité ».
Pour notre part, l’idée que ceux qui devraient être les représentants du peuple (députés et sénateurs) se penchent sérieusement sur les décisions du gouvernement en matière de diagnostics et d’immobilier ne nous semble pas déplacée mais au contraire favorable à renouer le lien citoyen entre vendeurs et acheteurs, locataires et bailleurs, diagnostiqueurs et donneurs d’ordre.
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