Le nouveau DPE 2022 (Diagnostic de Performance Energétique) associé aux exigences de la Loi Climat pourrait faire sortir du parc locatif plusieurs millions de logements classés ‘passoires thermiques’. Pendant ce temps, l’inflation, la pénurie de matériaux et les impératifs de la RE2020 augmentent le prix de construction de logements neufs. Si l’on ajoute à cela la réticence de quelques maires à délivrer des permis de construire afin notamment de lutter contre l’artificialisation des sols (sans les recettes de la taxe d’habitation) ; la cocotte-minute logement monte encore plus en pression. En outre, les candidats à l’accession à la propriété voient leurs capacités d’emprunt se réduire, et pour les occupants c’est l’augmentation du montant des charges qui inquiète plus d’un propriétaire sur deux. Bombe environnementale à désamorcer rapidement, bombe sociale pour certains, économique pour d’autres, le logement en France est entré dans un cercle vicieux d’enchaînement de crises pour lequel il ne semble pas y avoir de solutions, pour le moment seulement, espérons-le.
Tout n’est pas noir puisqu’au niveau de l’environnement la volonté française (mais surtout européenne) de libérer le parc immobilier résidentiel des énergies fossiles est un formidable bond en avant.
Il le fallait aussi bien pour l’environnement que pour l’indépendance énergétique des états (le blocage du gazoduc Nord Stream 2 ainsi que l’abandon du gazoduc Maghreb-Europe en sont des exemples récents). Ainsi abandonner le gaz comme énergie pour les logements est opportun. Sauf que pour les industries dont celles qui fabriquent les matériaux de la construction, ce sera un challenge à relever. De là, augmentation des coûts de production (matériaux, huisseries, isolants, etc.), ralentissement dans la construction de logements neufs et ralentissement de fait de l’artificialisation des sols laissant davantage d’espaces aux espaces verts et aux cultures.
Donc, merci aux mesures environnementales pour le logement qui permettront de décarboner un peu le parc immobilier.
Abandonner le fioul et le gaz pour chauffer les logements et produire l’ECS (Eau Chaude Sanitaire) c’est bien, mais il faut bien remplacer ces énergies par d’autres.
Pour la biomasse, on s’y emploie avec plus ou moins de bonheur mais avec beaucoup de délai. Alors il reste l’électricité. Mais nos capacités de production sont au plus bas alors que le logement en consomme davantage tout comme les industries nouvelles et/ou relocalisées. La construction de nouvelles centrales nucléaires est certes programmée, mais d’abord il faudra beaucoup de temps pour les construire (si l’on sait vraiment les achever, comme c’est le cas pour les EPR…).
Alors, pour le logement, on mise tout ou presque sur la PAC (Pompe A Chaleur) en oubliant un peu vite que si ces appareils ont d’excellentes performances durant une bonne part de l’année, dès lors que la température de leur source (air ou eau) baisse, leur COP (Coefficient Optimal de Performance) baissera jusqu’à les rendre inopérants.
Pour l’industrie, relocaliser c’est bien mais c’est reconsommer ici ce que l’on consommait avant chez les autres. Surtout si en sus on lance de nouveaux procédés très énergivores comme la fabrication de batteries, de panneaux solaires ou la destruction d’amiante à la torche à plasma (> 4 MW d’électricité).
Émerge également le problème (ou la solution) de l’engouement pour les voitures électriques et hybrides rechargeables qui augmentent d’autant la consommation en électricité des ménages et des parcs d’entreprises.
Ce que nous faisons alors, c’est construire davantage d’éoliennes et de parcs photovoltaïques qui pourront produire un peu de cette électricité mais pour les fabriquer il faut des ressources et de l’énergie, toutes deux de plus en plus chères car de plus en plus rares.
Réduire drastiquement les consommations en énergie des logements est indispensable. C’est l’objectif du nouveau DPE, des limitations imposées à terme par la Loi Climat, les obligations d’audit énergétique et les aides et accompagnements à la rénovation énergétique.
Mais au vu des coûts (en hausse), de la pénurie de matériaux, du cahier de commandes des artisans et du lointain (voire inexistant) retour sur investissement, peu de propriétaires et encore moins de bailleurs privés font de la rénovation globale, la seule réellement efficace.
Il est probable qu’il va falloir pour la plupart d’entre-nous revoir nos aspirations en termes de logement. Le petit appartement en immeuble collectif (récent) plutôt que la maison individuelle avec jardin, et vers la mutualisation des frais par la colocation, le cohabitât ou habitat participatif. Rappelons que ces notions ne sont pas nouvelles puisque déjà encadrées par la Loi ALUR du 24 mars 2014 qui a créé un statut juridique pour l’habitat participatif.
Et puis, il ne faut pas négliger le problème du squat et du nombre de squatteurs qui semblent pouvoir d’autant plus augmenter qu’il sera plus difficile voire impossible de se loger. Si les coûts du logement sont de plus en plus élevés (énergie, taxe foncière, charges de copropriété) jusqu’à devenir insupportables, la sécurité de son logement risque de le devenir également à son tour. Alors l’habitat participatif semble être la solution de repli aussi bien pour les jeunes en quête de logement que pour les anciens vieillissants au pouvoir d’achat en déclin.
En outre, la création de tels logements dont les coûts sont partagés peut relancer la construction ainsi que la rénovation d’immeubles anciens. Des outils comme le DTG (Diagnostic Technique Global) et le PPT (Plan Pluriannuel de Travaux) existent déjà pour sécuriser les opérations de divisions d’immeubles anciens.
Une piste ou la seule solution pour recréer du lien social, limiter les coûts du logement et le permettre à bien plus de personnes tout en réduisant les dépenses en énergie de constructions récentes ou rénovées, sans avoir à artificialiser davantage de sols, ni à expatrier des citadins aux déplacements gourmands en énergie ?
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