Nos actualités

L’interdiction par les maires de location de logements insalubres

La Commission des Lois de l'Assemblée nationale a adopté le 7 novembre l’amendement au projet de loi Engagement et proximité, donnant au maire la possibilité d'interdire la location d'un bien "manifestement insalubre, indigne ou dangereux". Médiatisé comme une grande nouveauté, cet amendement donne davantage de pouvoirs de police aux maires mais ne constitue pas une réelle nouveauté. La Loi interdit déjà de louer un logement insalubre, indigne ou dangereux. Mais alors pourquoi cet amendement ? Peut-être que la législation en vigueur n’est pas toujours appliquée ou intervient trop tard ? Si déléguer au maire la responsabilité de faire appliquer la loi en matière de logement indigne représente une avancée en termes de rapidité d’application, c’est aussi et surtout l’invitation à toutes les communes d’imposer le permis de louer ou l’autorisation de mise en location.

 

La législation sur le logement insalubre, indigne ou dangereux

La législation en vigueur traite déjà des logements (appartement ou maison) et des immeubles (parties privatives et parties communes) considérés comme insalubres dès lors qu’ils sont dangereux pour la santé de leurs occupants ou du voisinage du fait de leur état ou de leurs conditions d'occupation. L'insalubrité résulte d'un désordre grave ou d'un cumul de désordres analysés en se référant à une liste de critères d'évaluation. Parmi ceux-ci, figurent bien évidemment le plomb dans les peintures, l’état de conservation des matériaux amiantés, l’état des installations intérieures de gaz et d’électricité, mais aussi la structure, l’étanchéité et l’isolation thermique.

En bref, tous les items couverts par les différents diagnostics immobiliers.

Différents textes dont le Code de la santé publique : articles L1331-1 à L1331-31 et la Circulaire du 8 février 2019 relative au renforcement et à la coordination de la lutte contre l'habitat indigne interdisent déjà la mise en location et même l’occupation d’un logement ou d’un immeuble, insalubre, indigne ou dangereux. Le problème récurrent est que l’application de ces textes est du ressort de la justice ou de la préfecture et, en ce cas, de l’État.

 

La responsabilité actuelle des maires

Il existe déjà des dispositifs plus locaux (comme ORCOD, VOC, POPAC) donnant aux maires des pouvoirs de police, de sécurité et de salubrité sur le parc immobilier de leur commune. Mais le zèle des municipalités n’a pas toujours permis de déceler (et donc de lutter) contre l’habitat indigne, insalubre ou dangereux.

Le projet de donner davantage de pouvoir de police au maire en matière de salubrité et de sécurité des logements sur leur commune est une belle annonce, mais ne fait, au final, qu’enfoncer une porte ouverte. Les maires avaient déjà ce pouvoir mais pas toujours la volonté de l’exercer.

Pour mémoire, ainsi que nous en faisions état dans un article paru peu après l’effondrement dramatique d’immeubles rue d’Aubagne, 3 ans après la mise en place de VOC et POPAC sur le patrimoine immobilier phocéen, il a encore été dénombré 40 000 logements insalubres à Marseille...

 

Ce que l’interdiction de louer par le maire peut changer

L’amendement à la Loi Engagement et proximité qui permettrait au maire d’interdire la mise en location d’un logement « manifestement insalubre, indigne ou dangereux » va d’abord permettre d’accélérer l’évacuation des occupants d’un tel logement ou d’un tel immeuble sans avoir à attendre la publication d’un arrêt de la justice ou de l’état (via la préfecture) en fonction du zèle des services municipaux. Mais pas seulement…

Pour les locataires et pour le voisinage d’une construction insalubre, indigne ou dangereuse, il suffira d’alerter sa mairie pour que le maire devienne responsable au cas où une telle situation perdurerait. En effet le terme de ‘manifestement’ sous-entend qu’une manifestation d’une telle situation (courrier, mail, appel téléphonique…) ait été reçue par la mairie pour que le maire en ait eu connaissance et devienne responsable d’une action à entreprendre.

Et puis, ce qui pourrait également se profiler, c’est la généralisation à toutes les communes de l’obligation d’obtenir une autorisation préalable de mise en location ou permis de louer. En effet on peut raisonnablement imaginer que les services municipaux voyant leur responsabilité directement et immédiatement engagée en cas de signalement de logement ou d’immeuble indigne, insalubre ou dangereux désirent agir rapidement. Mais, à moins de recruter de nombreux agents qu’il faudra assermenter afin qu’ils puissent pénétrer dans les logements, il sera difficile pour certaines (toutes ?) les mairies d’intervenir dans l’urgence. C’est là que le permis de louer ou autorisation préalable de mise en location va devenir la précaution facile qui permet d’autoriser ou d’interdire la location avant même qu’elle ne soit effective.

 

Nota : Ce que l’amendement ne dit pas, c’est quelle sera la responsabilité d’hébergement des occupants pour le maire interdisant la poursuite d’une location vis-à-vis du logement indigne, insalubre ou dangereux ? Dans l’application du DALO (Droit Au Logement Opposable), ce sera alors au préfet (donc à l’État) et non à la commune de faire une proposition de logement.

 

Il semble donc probable que la grande majorité des communes, et notamment celles où l’habitat est tendu et l’immobilier ancien, va choisir de rendre obligatoire le permis de louer ou autorisation de mise en location ; surtout que certaines font payer ce document « entre 60€ et 114€ ». Source LesEchos

La bonne nouvelle est qu’il sera difficile, voire impossible, pour les bailleurs indélicats de ne pas faire effectuer les diagnostics immobiliers obligatoires ainsi que l’état de décence et de salubrité. La mairie les leur demandera en premier chef, dès lors qu’une manifestation de l’état probable d’indignité ou d’indécence d’un logement ou d’un immeuble aura été reçue d’un occupant, d’un visiteur, d’un voisin, voire d’un passant soucieux de la santé et de la sécurité de tous….


Newsletter



création site internet

SASU au capital de 100 000 EUR | Immatriculée au RCS de Bayonne sous le numéro unique d'identification 490 097 888

Remonter